Un ami m’a proposé de participer à une soirée littéraire.
J’ai accepté, mais…
Quand en entrant dans le salon je réponds aux bonjours, tout en moi me crie de m’enfuir.
Comme souvent dans ce cas, je tente de noyer ces voix dans un mauvais Médoc, repéré au milieu des immenses salades qui recouvrent la table.
Il faudra bien que trois grands gobelets plastiques passent par mon gosier pour que celui-ci se desserre et que je cesse de déraper dans le fausset.
Mais pas de répit : à peine le temps de considérer la bibliothèque - pour commencer, toujours -, l’espace offert par cette maison bourgeoise du quinzième arrondissement, la décoration soignée au conformisme sophistiqué.
Finies les observations, on appelle les braves, la lecture va commencer.
Dans mes tremblements qui reprennent, j’essaie de me sentir fort.
Il faut se ressaisir foutrejupe !
Mon idée de la virilité s’accommode mal des ces petites défaillances. Idée qu’il aura d’ailleurs déjà fallu convaincre que lire ses délicates bafouilles devant un parterre de gens aux prétentions littéraires similaires aux siennes et se rêver en Eastwood ne présentaient pas, forcément, de radicales incompatibilités.
Et puis, honnêtement, il est trop tard pour filer maintenant.
Au point où nous en sommes, la honte sera de toute façon moins intense si je balance mon texte plutôt que partir en courant avec ou sans prétexte.
Le tirage au sort me favorise, j’ouvre le bal : perspective d'un débarras rapide, c’est parfait !
Allons : voix claire, regard droit devant comme un funambule, c'est parti.
De la part d'un avare en compliment, en la matière : c'est drôlement bien. Dommage que ce soit beaucoup plus court que le Grevisse.
Rédigé par : Raveline | 23 avril 2009 à 10:39
"je tente de noyer ces voix dans un mauvais Médoc [...] Il faudra bien que trois grands gobelets plastiques passent par mon gosier"
Du mauvais vin dans des gobelets en plastique !!! Comment peut-on honorer la littérature en piétinant le goût !
Les bourgeois ne sont plus ce qu'ils étaient ;-)
Rédigé par : polluxe | 23 avril 2009 à 11:46
J'ai aimé ton billet, comme le texte que tu as lu.
J'ai déjà connu ce genre de péripéties avec une monumentale histoire de la philosophie, chiante à mourrir...
à bientôt
Rédigé par : LOmiG | 23 avril 2009 à 14:27
@ Raveline,
Merci beaucoup. C'est court parce que je ne sais faire long. mais, de toute manière la lecture ne devait pas dépasser 7 minutes (saine précaution à mon avis).
@ polluxe,
Il y avait aussi de bons vins à disposition, j'ai simplement commis l'erreur de me précipiter sur la bouteille ouverte la plus pleine. Erreur de débutant que je mettrai sur le compte de la panique.
@LOmiG,
Merci. Mais je crois que la différence tient dans le fait que le Grevisse n'est tout simplement pas fait pour être lu de bout en bout. C'est mon projet qui était surtout un peu ridicule...
Rédigé par : aymeric | 23 avril 2009 à 23:00
Bon, moi ça fait bien quatre ou cinq ans que je fais la même chose pour les innombrables livres que j'emprunte à la bibliothèque. Je finis par être un pro de la quatrième de couverture.
Rédigé par : le passant | 24 avril 2009 à 21:39
Yess, joli texte Aymeric. J'aime bien, il a le charme surrané des pépites que ma grand mère et ma tante m'ont parfois lues ou récité, ce bon vieil art de dire, de peu, beaucoup.
et les autres textes ? tu as aimé, certains ? tu recommenceras ?
tu l'as écris pour l'exercice ou il existait ce texte, déjà ?
Rédigé par : Nadine | 25 avril 2009 à 13:40
@u passant,
Donc toi aussi tu es un médiathèque's addict ? J'ai récemment renoncé à cesser d'emprunter plus de livres que je ne pourrai en lire.
@ Nadine,
Ce texte a été écrit spécialement pour l'occasion. D'où un rendu assez scolaire je trouve.
(Quand j'avais en tête un univers à la Sempé.)
Rédigé par : aymeric | 25 avril 2009 à 21:55