Le confort du canapé qui, si on ne se laisse pas aller à trop d’avachissement, permet une bien meilleure vison des films que ne le peuvent les très inconfortables strapontins.
Et je me fous des fatwas scandalisées des ayatollahs de la salle noire !
Rien de honteux à avoir besoin d’un peu d’aises pour déguster son long métrage ; des conditions spartiates me rendent trop mauvais public.
Tenez, il y a une petite dizaine de jours, j’eus le cul tellement mal établi que me furent tout à fait insupportables quelques saillies d’un coco-catéchisme pour lequel je n’ai déjà d’ordinaire que très peu de complaisance.
C’était à la Fondation Cartier, qui, présentant ce soir-là un ciné-concert - cocktail dans l’air du temps - démontrait également d’assez pauvres qualités d’hôtesse. Enfin pour ceux qui, comme moi, ont le séant sensible et dont l’état joue sur l’humeur.
Maintenant que j’ai retrouvé le moelleux du foyer que vous dire de plus sur cette soirée ?
Que malgré mes bougonnades La Terre est un beau film, pas complètement gâté par les désagréables scories dont je parlais plus haut.
A propos de celles-ci, fouillant dans les étages de ma bibliothèque consacrés au cinéma – c’est qu’on prépare un minimum ses écrits par ici ; on ne se paie pas votre fiole – j’ai trouvé une très juste – comme souvent - formule de Jacques Lourcelles : « L’allégorie poétique possède souvent chez Dovjenko le schématisme dangereux des procès d’intention. » Dans ce même livre je dénichai encore cette anecdote édifiante : figurez-vous qu’à la sortie du film la Pravda s’émut un peu de ce que la condamnation des koulaks était un peu trop manichéenne et schématique. Je vous laisse donc imaginer quelle subtilité la charge peut parfois atteindre.
Malgré tout, disais-je, beau film.
Des séquences vraiment pleines de grâce quand le propagandiste se fait plus formel que démonstratif. Ici un champ de blé ondulant au vent, là des fruits en monticules – réussite du parti pris des choses - et surtout, au mitan du long, cette envoutante danse dans la poussière de Vassili, le jeune Kolkhozien enthousiaste ; une danse brutalement interrompue par un coup de feu et ce visage qui se fige.
Et puis il y avait la musique.
Oui, car rappelez-vous, il s’agissait d’un ciné-concert et le monsieur chargé de l’habillage sonore était Bed - Benoît Burello de son état civil – accompagné de sa guitare, de quelques claviers et de tout un tas de petits appareils de traitement sonore que je ne pourrais vous détailler n’y connaissant pas grand-chose.
Plutôt convaincant dans l’exercice, le bonhomme – que je suis depuis quelques années - loucha davantage vers les évidences Wyattiennes de ses débuts – pour faire injustement réducteur, un point de vue plus détaillé par ici - que vers les faux airs de Long Fin Killie et Mabuses que prenait parfois son précédent opus. Encore qu’une rythmique enlevée ici - pour accompagner la scène du tracteur ; scène impressionnante pleine de fascination pour l’industrie naissante – ou là un son de guitare plus agressif ne laissent pas croire à une évolution complètement à rebours de la musique de Bed.
Enfin, tout ça ce ne sont que des détails notés après coup, dans la reconstruction du concert faite sur le chemin du retour. Non, ce qui s’est pour moi vraiment détaché lors de ce concert c’est la qualité de la voix, légère et pleine, lumineuse, aérienne ; contrepoint parfait aux labours de l’écran, elle fut pour moi le meilleur des Synthol.
Pour ce qui est du cinéma chez soi, j'ai un point de vue un peu différent : http://revereveille.over-blog.com/article-11784247.html
mais il est vrai que nous n'avons pas (plus) ici de ces espèces de Midi-Minuit où l'on peut voir tous les films de rêve (le jeudi à 12h30, d'accord, mais c'est mieux que rien) dans des banquettes dignes d'un instrument de torture médiéval. Je me souviens des bancs de bois à échardes garanties sur lesquels on voyait du Mnouchkine dans les années '70...
Quant à Lourcelles, parfaitement d'accord - sauf quand je ne suis pas de son avis et que je le maudis.
Rédigé par : cdc | 17 mars 2009 à 09:39