Samedi 18 octobre à la Cité de la Musique eut lieu la soirée Versus :
la confrontation de musiques électroniques populaire (représentée ici par une
de ses grandes figures, l’américain Carl Craig) et savante.
Pour se mesurer au musicien de Detroit, un casting à l’avenant :
quelques grandes figures du cross over avec le grand producteur Moritz Von Oswald (Basic
Channel et Rythm’n’Sound entre autres, et ayant déjà travaillé sur une
adaptation du Bolero
de Ravel auquel il fut d’ailleurs fait allusion durant la soirée), le chef
d’orchestre François-Xavier
Roth et le pianiste Francesco
Tristano qui ne dédaigne ni les jazzeries ni les crépitements lancinants de l’IDM.
.
En fait de confrontation il y eut alternance
de versions orchestrées de quelques tubes de la tête d’affiche avec des morceaux
plus classiquement contemporains, sans doute davantage dans les cordes – encore
que - de l’ensemble Les
Siècles : Le City Life de Steve
Reich et Streets
de Bruno Mantovani (Vous noterez la
coloration urbaine des morceaux choisis).
Commençons par ceux-ci.
.
City Life est une des pièces les plus connues de Reich et, de mon point de
vue, l’une de ses toutes meilleures (avec Music for 18
Musicians). Il est possible que, paradoxalement, cette proximité ait pu limiter
le plaisir ressenti. Comme c’était la première fois que j’assistais à une de
ses exécutions, peut-être m’attendais-je à davantage. Je n’ai rien à reprocher
aux musiciens, je ne me suis senti trahi en aucune manière et les premières
mesures entendues me furent même un vrai bonheur. Mais un bonheur sans montée
qui s’émousserait presque de ne pas avoir connu de crescendo.
Pour ce qui est de Streets, l’œuvre de Bruno Mantovani, je mis un peu de
temps à rentrer dans un morceau qui m’apparut tout d’abord comme sacrifiant par
trop aux canons d’un atonalisme rigide (il est dédié à Pierre Boulez) puis,
petit à petit, les nappes de violon, le motif obsessionnel de la harpe donnent
cohérence et tenue à l’ensemble et rendent bien ce chaos dans le statisme
qu’imaginait son auteur. Pas une révélation mais une belle découverte.
.
Venons enfin maintenant à la star de la
soirée (à voir les affiches, je suppose que l’essentiel de l’assistance est
venue sur son nom ; d’ailleurs moi-même…). Là encore, l’impression est
mitigée. Je dirais que les arrangements en eux même sont plutôt réussis, et que
le traitement du son et le travail sur les boucles, grésillements et autres
effets sonores se mariaient extrêmement bien à la matière orchestrale. J’ai
plus d’une fois pensé au très beau travail de Vincent
Artaud. Tout cela aurait donc été parfait si les incursions rythmiques ne
s’étaient pas avérées désastreuses. Un beat systématiquement trop lourd et
comme artificiellement collé. Produite telle quelle, la colonne vertébrale de
la house de Craig sonnait ici comme un ajout de mauvais goût.
On me dira que c’est le sort commun à
ces tentatives de greffes contre nature, mais je ne m’en satisfais pas, gardant
le souvenir de la soirée Warp
works & 20th century masters, il y a deux ans dans les mêmes lieux, qui
était fort réussie et ne tombait jamais dans ces sortes de travers
Peut-être le décalage malheureux était-il l’effet de conditions acoustiques déficientes, peut-être plus simplement était-ce ce rendez-vous qui était manqué ou en rodage mais si cette soirée fut plaisante elle eut tout de même aussi quelque chose d’un peu décevant.
Add du 28/10 :
Le collectif Grandcrew a filmé ce concert, consultable dans son intégralité ici.
il a des pieds gigantesques Carl Craig ou bien ???
(ou bien c'est un effet du grand angle sur la photo...)
Rédigé par : camille | 22 octobre 2008 à 10:33