En 1993, Jacques Généreux, pas exactement un adepte de
l’ultralibéralisme, écrivait dans son Introduction
à la politique économique : « L’impuissance de politiques
keynésiennes face au dilemme de la stagflation va progressivement renverser les
stratégies politiques. Les années 80 seront ainsi le lieu d’un quasi-consensus
monétariste et libéral. »
Ainsi, ce n’est pas par l’intermédiaire d’élites réunies en complot
et retournant le concept de l’hégémonie culturelle gramscienne au profit du
capital que les recettes keynésiennes ont été abandonnées mais à cause de leur
impuissance à résoudre les nouveaux
problèmes du temps.
Une simple histoire d’adaptation en somme.
L’imperfection étant notre nature, il n’y avait que quelques naïfs
pour supposer qu’on tenait là LE fonctionnement économique pour les siècles des
siècles.
Chaque système engendre inévitablement ses propres effets pervers,
parfaitement imprévisibles le plus souvent.
D’autre part, pour importante que fut l’évolution, la netteté de la
nouvelle théorie dut bien s’accommoder de bricolages presque contre nature (n’en
déplaise à quelques-uns, ni l’Etat ni les régulations n’ont jamais complètement
abandonné
la partie).
Pourtant, comme certains ont tendance à adopter telle ou telle
théorie économique comme on rentre en prêtrise, quelques dévots keynésiens
attendaient avec impatience leur revanche.
Se sentant exaucés depuis peu ils ne cherchent pas à cacher leur
revancharde jubilation devant ce qu’ils espèrent être un grand tour de roue.
Et pourquoi pas.
Les changements de paradigmes arrivent, comme celui évoqué plus
haut le prouve, et les récents événements ont a priori l’ampleur suffisante
pour impulser quelques nouveautés de grande importance dans la mécanique financière
et, plus largement, dans la manière de pratiquer les politiques économiques.
Seulement, alors qu’on ne sait même pas encore de quelle nature est vraiment la crise, quoiqu’en disent ceux qui font profession de prophètes, il est sans doute encore un peu tôt pour savoir si nous nous apprêtons à franchir la ligne qui sépare les mesures ad hoc, même conséquentes, du grand chambardement.
Oui, oui, they're back ! On ne voit plus que Fitoussi ces derniers temps (encore est-il un bien brave homme, comme beaucoup de néo-Keynesiens, par ailleurs). Un petit billet du Monde du 2 courant l'annonçait : la revanche de Keynes.
Pour ce qui est de Fukuyama, on se demande comment on publie encore ce champion du fourrage de doigts dans les yeux.
Rédigé par : cdc | 13 octobre 2008 à 14:51
Incroyable !
Toutes les théories libérales pitoyables démontrent enfin leur nullité toxique, et vous arrivez encore à pisser sur ces malheureux keynésiens et ce bon Halimi, (dont vous n'avez sûrement pas lu le livre, sinon vous sauriez qu'il n'y est nulle part question d'un complot, mais d'une conjonction entre des intérêts puissants et un moment de l'Histoire).
Un petit distingo tout de même, qui ne vous a manifestement pas frappé : les keynésiens eux, ont au moins réussi quelque chose : les Trente Glorieuses, dont on peut par ailleurs penser ce qu'on veut. Qu'on fait les monétaristes ? Les Vingt Merdeuses ?
Donc oui, (espérons que) ces gens seront renvoyés dans la poubelle de l'Histoire, et oui encore - vous avez raison - nous ignorons de quoi demain sera fait. Indeed.
Rédigé par : manu(Constantin) | 13 octobre 2008 à 23:22
Cher Manu,
Incroyable en effet : nous sommes d’accord sur un point.
Du coup, tout à cette joie inattendue, je vais commencer par vous avouer, qu’effectivement, je n’ai pas lu le livre d’Halimi.
A ma décharge je ne pensais pas tant déformer que ça son propos car me basant essentiellement sur ce que m’en disaient ses laudateurs.
Certes le mot complot était sans doute malvenu mais vous m’accorderez bien cette petite tendance à forcer le trait à laquelle vous-même succombez volontiers lorsque vous m’accusez de taper sur les keynésiens quand je ne parle que de quelques dévots.
Je devrais m’arrêter ici pour ne pas risquer de briser cette belle mais fragile concorde mais je ne peux m’empêcher de revenir sur un autre point de votre commentaire. Vous vous demandiez ce qu’avaient bien pu contenir de positif ces « vingt merdeuses » dont les responsables seraient ceux qui récemment démontraient « enfin – j’aime beaucoup ce enfin– leur nullité toxique » ; je vous invite à jeter un œil ici.
Rédigé par : aymeric | 15 octobre 2008 à 20:37
Joie de la concorde !
Vous avouez que vous critiquez un livre que vous n'avez pas lu, en vous basant sur des on-dits de laudateurs que vous n'estimez guère ; je peux donc vous avouer à mon tour que ma formulation fut maladroite lorsque je parlai de "nullité toxique enfin démontrée" : j'aurais dû ajouter un complément : "à ceux qui n'ont rien voulu voir".
En ce qui concerne le longuet argumentaire de The Economist, ce Pangloss de la finance, il me semble y avoir discerné quelques traces d'objectivité (immédiatement recouverte de la boue haineuse et autosatisfaite épandue dans la conclusion). J'y reviendrai donc volontiers si l'occasion m'en est donnée.
Rédigé par : manu | 15 octobre 2008 à 23:10
Joie de la concorde !
Vous avouez que vous critiquez un livre que vous n'avez pas lu, en vous basant sur des on-dits de "laudateurs" que vous n'estimez guère ; je peux donc reconnaître à mon tour que ma formulation fut maladroite lorsque je parlai de "nullité toxique enfin démontrée" : j'aurais dû ajouter un complément : "à ceux qui n'ont jamais rien voulu voir".
En ce qui concerne le longuet argumentaire de The Economist, ce Pangloss du néolibéralisme, il me semble y avoir discerné quelques traces d'objectivité (immédiatement recouvertes de la boue haineuse et autosatisfaite épandue dans la conclusion). J'y reviendrai donc volontiers si l'occasion m'en est donnée.
Rédigé par : manu | 15 octobre 2008 à 23:11
Rhoo....
Vous gâchez tout (et deux fois qui plus est) mais j'avoue que je ne suis guère surpris.
Tout d’abord, puisque vous semblez y tenir, je ne critique pas un livre mais une idée reçue que certains véhiculent en s’appuyant sur ce livre, et en soutenant que « les transformations économiques du dernier quart de siècle n’ont été le produit ni du hasard ni de la nécessité. […] C’est que tout un travail idéologique était intervenu au préalable, c’est que les solutions alternatives au marché avaient été détruites afin qu’il n’y ait plus d’alternative. »
J’ai la faiblesse de penser que la nuance était aisément compréhensible mais puisqu’il faut vous expliquer en détails…
Ensuite et plus généralement : je crois vous l’avoir déjà dit et je vais donc me répéter, vous n’êtes pas là, Manu, pour discuter mais pour exhiber votre vertu et déverser vos sarcasmes.
Par conséquent, ne vous en offusquez pas je vous prie, mais il est fort probable que je prenne la liberté de ne plus trop vous répondre à l'avenir.
Une prose toujours si courtoise, une lecture toujours si honnête c’en est complexant voyez-vous.
Rédigé par : aymeric | 15 octobre 2008 à 23:48