Mots vite jetés en cette période de manque critique de temps :
L’Europe encore… Question de période sans doute : comme Damien le rappelait, dans trois semaines, nous serons vingt sept. Sur cette question (polémique) de l’élargissement, une tribune intéressante d'Ulrich Beck dans le Monde, plus particulièrement centrée sur le cas de la Turquie (encore plus polémique). Comparant ce qui se dit actuellement de la Turquie et ce qui se disait il y a plusieurs années de l’Allemagne il tente de démontrer la fragilité des arguments des opposants à son entrée. Mais le plus intéressant est sans doute dans ce concept d’européisation : « un processus, un apprentissage historique de découverte et d'épanouissement de l'âme européenne ». Discutable sur quelques points mais stimulant.
L’Europe toujours, enfin indirectement. Souhaitant surfer sur la dynamique du Non, les antilibéraux peinent depuis des mois sur une éventuelle candidature unique qui tient décidément de l’Arlésienne.
Le Passant a très bien saisi ce qui chez cette gauche de la gauche fait constitutivement obstacle au compromis : « La gauche de rupture s'est constituée sur un impensé, l'existence quelque part d'un intérêt général ou d'un intérêt collectif dont se seraient détournés les pouvoirs économiques puis bureaucratiques, préférant servir leurs petits intérêts particuliers […] Or l'intérêt général n'existe pas, il se construit dans la négociation. »
Une analyse brève et lumineuse.
Selon Thucydide, lorsque la discorde est généralisée, l'usage normal de la langue se transforme : "On changea jusqu'au sens usuel des mots par rapport aux actes dans les justifications qu'on en donnait". D’accord, on n’en est évidemment pas là, mais j’avoue que j’ai eu un assez désagréable vertige en découvrant la dernière campagne d’affichage du FN qui se situe, je trouve dans ce genre de grand renversement de sens.
Etat des lieux :
- Nous avons la même analyse de la "gauche antilibérale".
- Nous divergeons sur l'idée de ce que pourrait être une gauche du compromis.Un rêve peut-être...
Comme diraient mes enfants : "tu rêves ta vie toi.."
PS : en tout cas tu peux être qualifié de "blog influent" car à chaque fois que tu parles de moi mes visites augmentent. sensiblement.
Rédigé par : le passant | 12 décembre 2006 à 19:55
Cher passant, c'est l'intérêt de vos commentaires qui fait bondir votre audience.
Quant à moi, je me rajoute à ces froides statistiques anonymes.
Et je vous félicite ici pour le billet écrit là-bas.
En passant, je suis sans doute très mal informé, mais j'ai été stupéfait d'apprendre il y a quelques jours que la Slovénie passe à l'Euro le 1er janvier.
J'aurais imaginé que les média auraient fait un peu plus de pub à cet évènement, mais non.
Que faut-il y voir ? Un effet de mon manque d'information (il est vrai que je ne vais pas souvent visiter le site de la commission européenne) ou, plus prosaïquement, une forme de rejet de l'Europe, scorie du résultat du référendum sur le TCE ?
Rédigé par : Thomas | 12 décembre 2006 à 21:54
Le concept "d'europeisation" me paraît discutable dans le cas de la Turquie. Par ailleurs, c'est surement une reprise du concept bien connu "d'européanisation" en sciences-politiques. "Faire communauté nous fait changer" pour résumer, mais pas forcément dans le sens d'une harmonisation.
Enfin, pour ce qui est de l'adaptation de ce concept à la Turquie, il se peut bien que je me fende un jour d'une note sur le sujet: je ne suis pas sur que l'action européenne mène à une "européanisation" de la Turquie... A suivre
Rédigé par : Philippe | 12 décembre 2006 à 22:28
Je m'associe à l'intérêt suscité par l'analyse du Passant, que je trouve moi aussi très éclairante...
Entendu ce soir sur I-télé une analyse de l'affiche du FN : l'image de la jeune fille pouce baissé est associée au slogan : "ils ont tout cassé" . Certes, ce slogan est censé illustrer les reproches faits au groupe indistinct : "droite/gauche" mais ces mots sont écrits en caractères bien plus petits. Le commentateur (dont j'ai oublié le nom) faisait remarquer que de loin, sur cette affiche, on verrait une jeune fille "look de banlieue" associée à : "ils ont tout cassé".
Où l'on retrouve le fond de commerce du FN.
Rédigé par : samantdi | 12 décembre 2006 à 22:57
Je trouve rafraichissant qu'il y ait des gens qui pensent que les antilibéraux recherchent l'intéret général.
La suite de l'article montre d'ailleurs que l'auteur a une vision libérale de l'intéret général qui ne correspond pas avec la vision Française traditionnelle et Républicaine de l'intéret général.
Rédigé par : Adam S. | 13 décembre 2006 à 00:20
@ le passant,
En fait, je crois que nous divergeons surtout sur notre analyse des rapports de forces en présence (leur ampleur comme leur possible durée).
Sinon, je te remercie, mais si j’étais de ceux qu’on a coutume d’appeler, les « blogueurs influents », tes statistiques changeraient dans de bien plus importantes proportions.
@ Thomas,
En même temps, qu’est ce qu’on en a à foutre des Slovènes ? T’en connais, toi ?
@ Philippe,
Bien-sur que le concept est discutable et qu’il simplifie à outrance un processus complexe mais je trouve intéressant que cet angle soit mis en avant. La construction européenne s’incarne aussi dans ces changements diffus, partiellement réciproques et pas seulement dans des performances économiques et des apaisements géopolitiques.
Maintenant, pour le cas de la Turquie, c’est vrai que nous sommes actuellement dans un tel état de tension qu’on peut se demander si on ne travaille pas davantage nos divergences qu’on les comble. Cependant, je reste quasi persuadé (mais il faudrait peut-être que je développe ça plus longuement un jour) que l’intégration de la Turquie sera profitable aux deux parties sur le long terme (car, processus de négociation oblige, on raisonne sur des temps assez longs) mais bon, c’est un peu un pari. (Hâte de te lire sur le sujet, ceci-dit).
@ Samantdi,
N’est-ce pas une manière de se rassurer ? Moi je constate qu’il y a dans la perception du Front National une manière de grand bouleversement. Un peu comme si Le Pen avait finalement réussi à incarner ce dont il était jusqu’à présent l’antithèse (peut-être un pervers effet boomerang après des années d’unanimes condamnations).
Dieudonné sortant de la Fête « Bleu-Blanc Rouge » se justifiait au nom du républicanisme, de l’universalisme et de la lutte contre tous les communautarismes ; il semblait trouver chez Le Pen une présentation à ses yeux acceptable de ces valeurs. Serge Moati auteur il n’y pas si longtemps d’un documentaire à charge contre Le Pen déclare maintenant qu’on aurait du écouter plus tôt le leader du Frant National car il avait raison sur plus d’un sujet. Etrange quand-même, non ?
@ Adam S.,
Une vision libérale, ce n’est pas complètement faux, mais je ne suis pas persuadé que le passant apprécie votre compliment à sa juste valeur.
Rédigé par : aymeric | 13 décembre 2006 à 11:07
@ ADAM.S : ah , c'est à moi que ça s'adressait ??..
Si par libéral on entend cette vision du social basée sur la recherche de l'intérêt et où la poursuite des intérêts individuels conduirait miraculeusement à l'intérêt de tous, je ne suis pas du tout libéral.
Je ne crois pas à un individu qui préexisterait à son inscription dans le social, mais je crois à l'autonomie de l'acteur social. Ce n'est paradoxal que si on essentialise cette inscription. Ca l'est moins si on pense qu'une inscription sociale n'a de réalité que de se différencier de l'ensemble des autres inscriptions possibles.
Quant à la formule "intérêt général" (vocabulaire il me semble effectivement assez nouveau à l'extrème gauche), je la reprends tout simplement à Michel Onfray : http://www.collectifdu29mai.org/APPEL-DE-MICHEL-ONFRAY-Liberation.html
Le reste de mon article explique il me semble qu'il est stérile de discuter pour savoir si cette "gauche de la gauche " défend ou non "réellement" l'intérêt général.
Rédigé par : le passant | 13 décembre 2006 à 13:16
@Passant:
QUOTE-----------
Or l'intérêt général n'existe pas, il se construit dans la négociation; il ne peut-être que le résultat provisoire et précaire d'une prise en compte, dans cette négociation, du point de vue et des intérêts de tous les acteurs sociaux
UNQUOTE-----------
Cela me semble pourtant bien être une vision du social basée sur la recherche de l'intérêt et où la poursuite des intérêts individuels conduirait miraculeusement à l'intérêt de tous. Ou alors c'est bien imité.
Le miracle en l'occurrence provenant essentiellement de l'acceptation par chacun de son indépendance dans l'interdépendance et de l'efficacité de gouverner la collectivité sans référence aucune a une transcendance quelconque (Dieu, Marx, La Nation).
Rédigé par : Adam S. | 13 décembre 2006 à 19:09
Euh Aymeric, fais gaffe, tu te mélenchonise ! (et hop, un petit néologisme :P)
Sinon, non en fait, je ne connais pas de Slovènes, mais j'aimais bien leur monnaie : le tolar !
Ca vous a un petit côté dollar prononcé par un allemand enrhumé qui ne me déplaît pas.
Ah si, nos ours des Pyrénées relocalisés sont slovènes; enfin étaient puisque maintenant ils ont une carte de résident. Après le plombier polonais (ou avant d'ailleurs), les ours slovènes.
Comme quoi les PECO, on aurait du les laisser derrière leur rideau.
Nan j'déconne.
Rédigé par : Thomas | 13 décembre 2006 à 21:23
@ Adam.S
La différence tient dans la phrase que tu n'as apparemment (et sans doute pas sans raisons) pris en compte :
"Je ne crois pas à un individu qui préexisterait à son inscription dans le social, mais je crois à l'autonomie de l'acteur social. Ce n'est paradoxal que si on essentialise cette inscription. Ca l'est moins si on pense qu'une inscription sociale n'a de réalité que de se différencier de l'ensemble des autres inscriptions possibles."
Rédigé par : le passant | 13 décembre 2006 à 21:51
Quant au besoin d'un transcendant (je m'excuse de monopoliser les commentaires), c'est en effet une bonne remarque. C'est un rapport à l'ordre. On est toujours passé dans l'histioire un transcendant à un autre transcendant : Dieu, la Nature, le sens de l'histoire. C'est aussi lié à une conception du sociale. On peut penser qu'une sociologie relativiste pourrait conduire à une pratique politique d'accompagnement du changement plutôt que de maintien de l'ordre (pour reprendre un formule de Jean gagnepain).Mais ce n'est pas facile.Il ne faut pas désespérer Billancourt. Ainsi Bourdieu par exemple, tout en ayant une vision plutôt relativiste et conflictuelle du social (voir la distinction ou le sens pratique)ne s'est jamais opposé ouvertement à des postions politiques essentialistes.
Rédigé par : le passant | 13 décembre 2006 à 23:08
Passant:
Désolé je ne suis qu'un bac + 12 de formation scientifique et financière sans aucune compréhension pour les bourdieuseries.
J'aurais donc besoin d'une traduction Française (Anglais possible aussi) pour comprendre cette histoire d'inscription de la poule dans l'oeuf.
Rédigé par : Adam S. | 14 décembre 2006 à 10:27
La bourdieuserie en question est plutôt une Gagnepinerie (de Jean Gagnepain). Le cadre d'un commentaire n'est pas forcément le plus adéquat pour développer une idée. Je vous renvoie donc à mon blog (avec un peu de bonne volonté vous trouverez un développement de cette idée dans différents aricles-plutôt que les notes). Mais vous pouvez, ce serait même conseillé, remonter à la source et lire les trois volumes (notamment le vol2) du "vouloir-dire" de jean Gagnepain. Vous pourrez là évaluer l'efficacité de votre Bac+12 de formation scientifique et financière (vous avez redoublé au moins pour être resté si longtemps à l'école ?). Si vous avez du mal avec le vouloir dire (ce qui est, je parle d'expérience, plus que probable), vous pouvez vous rabattre sur "La Personne et la Société" de Jean-Luc Brackelaire (coll. Raisonnances chez DeBoeck) et notamment la deuxième partie ("corps, personne et vie sociale)ou "Aux fondements du lien social" de Jean-Michel Lebot (chez L'harmattan, logiques sociales).
Au fait ce que vous appellez l'histoire de l'inscription de la poule dans l'oeuf, ça s'appelle chez Gagnepain, la dialectique (pas tout à fait la même que celle de ses prédécesseurs).
Rédigé par : le passant | 14 décembre 2006 à 13:26
Vous croyez que je comprendrais? Cela ne semble pas le genre de livre que je puisse lire a voix haute en suivant la ligne avec mon doigt; vous n'auriez rien dans une collection illustrée?
Rédigé par : Adam S. | 14 décembre 2006 à 22:54